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13 octobre 2013 7 13 /10 /octobre /2013 17:22

http://static.decitre.fr/media/catalog/product/cache/1/image/165x250/9df78eab33525d08d6e5fb8d27136e95/9/7/8/2/2/4/6/8/9782246808718FS.gifLe quatrième mur / Sorj Chalandon.Grasset, 2013 325 pages. 4*

L'idée de Sam était folle. Georges l'a suivie. Réfugié grec, metteur en scène, juif en secret, Sam rêvait de monter l'Antigone d'Anouilh sur un champ de bataille au Liban. 1976. Dans ce pays, des hommes en massacraient d'autres. Georges a décidé que le pays du cèdre serait son théâtre. Il a fait le voyage. Contacté les milices, les combattants, tous ceux qui s'affrontaient. Son idée ? Jouer Anouilh sur la ligne de front.
Créon serait chrétien. Antigone serait palestinienne. Hémon serait Druze. Les Chiites seraient là aussi, et les Chaldéens, et les Arméniens. Il ne demandait à tous qu'une heure de répit, une seule. Ce ne serait pas la paix, juste un instant de grâce. Un accroc dans la guerre. Un éclat de poésie et de fusils baissés. Tous ont accepté. C'était impensable.Et puis Sam est tombé malade. Sur son lit d'agonie, il a fait jurer à Georges de prendre sa suite, d'aller à Beyrouth, de rassembler les acteurs un à un, de les arracher au front et de jouer cette unique représentation.
Georges a juré à Sam, son ami, son frère.Il avait fait du théâtre de rue, il allait faire du théâtre de ruines. C'était bouleversant, exaltant, immense, mortel, la guerre. La guerre lui a sauté à la gorge. L'idée de Sam était folle. Et Georges l'a suivie

 

J'ai beau aimer Sorj Chalandon, lorsqu'au détour d'une rencontre littéraire je l'ai entendu parler  de ce roman (que je venais d'acheter parce que c'était lui, sans avoir lu la moindre ligne), j'ai eu peur ! La guerre du Liban, monter Antigone en plein champ de bataille. Oups dans quoi allais-je m'embarquer ?

Mais voilà, Sorj Chalandon parlait et, même si mes craintes demeuraient j'écoutais, et je savais que ce livre j'allais le dévorer.

S'il n'a pas exercé la même fascination sur moi que La légende de nos pères ou Retour à Kiillybegs, je dois avouer que l'écriture et les mots de Sorj Chalandon dans ce roman ont su me toucher avec tout autant de force.

C'est bien souvent avec un poids au coeur que je tournais les pages, car même si l'auteur nous avait raconté la fin, si je connaissais bon nombre d'événements qui allaient se produire, je ne pouvais que suivre Georges qui essayait de respecter la promesse faite à Sam. Une folie, sa folie au milieu de celles des hommes qui s'entretuaient, se battaient pour un angle de rue. Tous ces hommes qui, par le passé avaient su vivre ensemble mais que la religion et la politique rendaient fous. Cela semblait une folie bien douce les miracles accomplis en amont par Sam avant qu'il ne puisse poursuivre son rêve terrassé par ses propres démons du passé. Alors en dépit de ce que je savais, je continuais à m'accrocher à l'espoir, à la vie de Georges en France, à sa femme et sa fille...

Le plus grand bruit de la guerre est le silence nous rappelle l'auteur, et il nous le fait ressentir dans le quotidien de son héros, soulignant le contraste du quotidien, de la vie, de ces amours impossibles ou devenus impossible lorsqu'on a vu trop de choses. Et, je n'ai pu m'empêcher de penser à Sorj Chalandon, journaliste, revenant à la vie quotidienne (comme ses confrères) et à sa quête de retour à une vie d'avant, avant la guerre, avant les morts, avant les massacres tels ceux de Sabra et Chatila, car comme il le dit ici et comme son personnage va le vivre, des morts sont sous ses yeux, mais le fait de prendre conscience qu'il s'agit d'un massacre vient plus tard (pour Georges par les détails atroces, pour Sorj parce que ses confrères lui donnent le mot) ; le quotidien est tel que la valeur de la vie, des événements s'avèrent totalement différent.

Plus qu'un témoignage, c'est bien un roman qu'on lit avec les espoirs de ceux qui ne connaissent pas la guerre, qui espèrent qu'il y a des bons et des méchants, mais la complexité de l'existence fait que tout n'est pas blanc ou noir. C'est déjà ce que Sam avait tenté d'expliquer à Georges et à ses amis dès les premières pages de ce livre, que je croyais avoir compris, mais la redite et mise en situation est salutaire pour tenter de ne pas oublier.

Un très beau roman, noir où l'espoir guette, même si....


  Rentrée Littéraire 2013

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commentaires

L
<br /> Ce livre en parle beaucoup. Je veux bien me laisser tenter!<br />
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T
<br /> Ecouter Sorj, c'est acheter son roman car il en parle toujours avec tant de passion et d'émotion. Je n'ai toujours pas trouvé le temps d ela lire mais ça ne saurait tarder !<br />
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U
<br /> <br /> Je te fais confiance. Et je pense avoir un autre roman qui pourrait te plaire ;0)<br /> <br /> <br /> <br />
K
<br /> J epense que je lirai Retour à Killysbegs (je ne sais pas comment ce mot s'écrit alors je change d'orthographe à chaque fois...) avant celui-ci.  Le theme m'intéresse plus.<br />
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U
<br /> <br /> C'est totalement différent. Vu la beauté du texte de" Retour à Killybegs", je ne peux que t'encourager à le lire.<br /> <br /> <br /> <br />